Amsterdam, où comment se sentir un peu
isolé au cœur de l’Indien. La terre la plus proche est l’archipel
de Kerguelen, située à 1200 km dans le sud-ouest. L’Afrique,
l’Australie et l’Antarctique sont à plus de 3000 km à vol
d’albatros. Perdu dans l’infinie de l’océan, c’est avec 19
autres camarat’s, devenus très vite des amis, que je laisse filer
un an d’une vie.
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Martin de Viviès, village
du bout du monde |
L’île, presque circulaire, culmine à
881 mètres et est tronquée par des falaises de 20 à 80 mètres.
Faut pas le dire trop fort mais c’est la plus belle des îles des
terres australes. J’écris cette phrase en toute objectivité bien
évidemment … A l’ouest, un effondrement ancestral a fait jaillir
ce qui est considéré comme l’un des plus beaux sites des Terres
Australes (çà par contre, il n’y a pas que moi qui le dis …)
: Entrecasteaux. Une falaise végétale vertigineuse peuplée de
milliers d’albatros et centaines de gorfous. Il n’existe pas de
mots pour décrire cet endroit à sa juste valeur. Ce qui est un peu
fou fou dans l’histoire, c’est que la cabane placée au pied de
ce cadeau du ciel est considérée comme la deuxième maison de
l’ornitho. Je vais y passer pas moins de 100 jours durant mon
hivernage. Mais chaque chose en son temps, parlons d’Entrecasteaux
un peu plus tard.
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vous devinez la nature du
petit point blanc dans le fond tous là-bas ? |
Sur l’île, le vent règne en maître.
Aucun obstacle sur des milliers de kilomètres, autant vous dire
qu’il vaut mieux s’abriter parfois. Elle est tellement paumée
que c’est l’un des endroits où l’air est le plus pur sur la
Terre. Des mesures et des prélèvements quotidiens y sont d’ailleurs
réalisés afin d’en évaluer la qualité. Comparés à ceux
effectués à d’autres endroits sur le globe, ils permettent de
mettre en avant ce que l’Homme fait subir à sa chère et tendre
petite planète…
Cela fait quatre mois et demi que j’ai
la chance d’explorer au quotidien ce drôle de caillou. Le temps
passe à une vitesse folle, c’est incroyable. Malgré la montre au
poignet, la notion des jours est bien souvent incertaine. Mardi,
jeudi … ??? La seule certitude est pour le dimanche, non pas
par ce que c’est téléfoot mais par ce que c’est croissants et
pains au chocolats au pti’déj’, héhé ! (y a pas la télé
de toute manière). La vie sur les îles rime souvent avec poissons,
fruits de mer et cuisine divine ! Avec le maître derrière ses
fourneaux, ce n’est pas cette année que je vais maigrir, tant pis.
C’est un peu comme si nous étions au restaurant tous les jours,
vous voyez un peu le genre. Gérées par la Reserve Naturelle des
Terres Australes et Antarctique Françaises, les eaux amsterdamoises
sont d’une incroyable richesse. Bleus, Rougets, Thons, Zourites,
Fausses morues et … Langouste en veux-tu en voilà depuis le bord.
Nous nous offrons quelques sorties lorsque le beau temps lé la. En
carrie, en tartare, à la tahitienne, en sauce, au barbec bref,
toutes les recettes y passent. C’est que du bonheur.
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en attendant ... |
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intense |
Malgré ce plaisir quotidien, il nous
arrive souvent de manquer des repas, et même des jours sur base,
explorations loisirs de l’île oblige. Les quelques bretons de la
base ne sont guère dépaysés par le climat, assez similaire à
quelques coups de vent près. Quelques nuits à la belle étoile sont
organisées. Bon duvet, sursac, gant et bonnet sont de rigueur. Les
nuits sont fraîches, surtout en altitude. Pollué d’aucunes
sources lumineuses, la clarté des astres en fait même briller nos
yeux. Pas encore observés d’aurores australes mais nous sommes à
l’affût. Il y a des nuits où nous avons des chances d’en
admirer (oui par ce que çà aussi c’est mesuré …) mais le
pourcentage est tellement faible que çà reste anecdotique. Nous ne
sommes pas à Kerguelen et encore moins à Terre Adélie …
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Bretagne quand tu nous tiens |
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La belle étoile |
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les Grandes Ravines de Del Cano |
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Posés qu'on est |
La faune impressionne de part sa
curiosité envers l’Homme. Malgré le fait que çà reste des
espèces sauvages et imprévisibles, nos côtoyons chaque jour ces
fameuses otaries d’Amsterdam. Le bâton est de rigueur pour qui
veux s’éloigner de la base. Rassurez-vous nous ne les frappons
pas, mais la vue de bâton les dissuadent de nous charger. En dehors
de sites de reproductions, elles sont globalement inoffensives,
affaler dans l’herbe à dormir, dormir et dormir encore. Les jours
de grand calme plat (autant dire que çà n’arrive pas tous les
jours), c’est baignade ! Nager avec eux, autour d’eux, c’est
incroyable. Et je ne vous parle pas des orques. Bon par contre, nous
ne nageons pas avec eux, mais nous les observons régulièrement au
loin, derrière la barrière d’algues qui est à un petit peu plus
de 100 mètres de la cale.
20 hivernants … des milliers
d’albatros, des milliers d’otaries, des milliards de langoustes,
du soleil (et deux nanas …). Ici la vie est belle et paisible.
Enjoy’
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dormir, dormir et dormir... encore |
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nous ne sommes pas si seuls que ça |